L’organisation des Droits de l’Homme, Human Rights Watch, a publié un rapport sur la situation des militants des droits de l’homme en Mauritanie. Le rapport intitulé « Ethnicité, discrimination et autres lignes rouges : Répression à l’encontre de défenseurs des droits humains en Mauritanie » a été présenté ce lundi 12 février 2018, au cours d’une conférence de presse qui s’est déroulée dans les locaux du Forum des Organisations Nationales pour les Droits Humains (FONADH), à Nouakchott.
Dans ce rapport, Human Rights Watch par la voix d’Eric Goldstein, directeur adjoint de la division Moyen Orient et Afrique du Nord, revient en longueur sur les mesures et procédés utilisés par les autorités mauritaniennes pour réprimer les organisations des droits de l’homme qui travaillent sur des sujets dits sensibles. Il est 11 heures passé, quand le coup d’envoi de la conférence de presse est donné. La salle de conférence du FONADH affichait complet. Sur ce point, Candy Ofime avocate et Chercheur pour Human Rights Watch, a expliqué d’emblée, qu’ils ont tenté d’organiser la conférence dans un espace plus grand, un hôtel. Mais cela n’a pas été possible faute d’autorisation.
Restrictions
Sur les 79 pages du rapport, 30 sont consacrées aux restrictions imposées à la société civile. Ce rapport souligne Eric Goldstein, « dresse l’état des lieux de la liberté accordée aux associations de défense des droits humains en Mauritanie » avant d’ajouter que s’il est vrai que « des centaines ou sinon des milliers d’organisations ont leur récépissés, il faut tout même noter que d’autres ne sont pas reconnus et se demander quelle est la marge de manœuvre qu’ils ont ».
Régime d’autorisation
La liberté de réunion et d’association est incontestablement une liberté fondamentale. Elle est consacrée par l’article 10 de la constitution et les nombreuses conventions signées et ratifiées par la Mauritanie. Mais la loi de 1964 sur les associations mène la vie dure aux organisations de droits humains qui n’ont pas de récépissés. Cela a notamment pour conséquences l’entrave voire la cessation d’activités. Il s’agit donc d’un régime d’autorisations.
Or, de par le monde, le régime par excellence des associations est déclaratif. L’on se souvient des déclarations Maina Kiai rapporteur spécial des Nations Unies sur le droit de réunion et d’association pacifiques, qui disait à propos du projet de loi sur les association de 2015 (pas encore adopté) « Une loi qui met en place des procédures obligatoires ‘d’autorisation préalable’ des associations, au lieu d’un simple processus de ‘notification préalable’, risque d’entraver le travail de la société civile en Mauritanie ».
Le ministre conteste
Mais le gouvernement n’est pas tout à fait d’accord. En effet, lors de leur rencontre avec les autorités en mars 2017, le ministre de la justice d’alors Me Brahim Daddah avait réfuté le fait que les organisations des droits de l’homme soient réprimées ou soumises à des restrictions. De plus, le ministre s’était exprimé en ces termes dans une lettre : « Il n’y a pas de restrictions imposées à la société civile ou sur ses activités, ceci tant que leurs conduites et leurs discours se conforment au cadre légal et procédural objectif. »
Page 28
Mais dans le deuxième paragraphe de la page 28 du rapport, il est écrit : « Les recherches menées par Human Rights Watch montrent que, contrairement à ces déclarations, les autorités ont recours à un large éventail de lois répressives et autres mesures visant à punir et entraver les activités des associations et individus qui s’expriment publiquement sur certaines des questions les plus sensibles du pays en rapport avec la justice sociale ».
Une chose est sur, les deux parties ne sont pas d’accord. D’ailleurs, l’ancien ministre de la justice Me Brahim Daddah, dans sa lettre adressée à Human Rights Watch parlait « d’affirmations dénuées de tout fondement concernant des violations des droits humains et le non-respect des libertés en Mauritanie ». Le ministre persiste et signe, « aucune restriction n’est imposée à la société civile ou à ses activités, tant que sa conduite et son expression ne sortent pas du cadre légal et procédural. Les faits ont été mal interprétés dans tous les cas auxquels vous avez fait référence ».
Recommandations
Soulignons en fin, que Human Rights Watch a formulé onze recommandations à l’endroit du gouvernement mauritanien. Parmi elles, on notera la demande de libération des détenus d’IRA, l’abrogation de la loi d’amnistie de 1993 (passif humanitaire) ou encore la limitation du pouvoir qu’ont les autorités de refuser d’enregistrer ou de dissoudre une association existante.
En Mauritanie, une certaine liberté de ton existe, sur les réseaux en particulier. Il existe cependant des obstacles auxquels se heurtent certains. Un certain nombre de journalistes et militants l’ont appris à leurs dépend.
Le rapport
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